Lire Cinquante nuances de Grey de E.L. James 11 ans après la hype, ça donne quoi ?

« Je ne pense pas que je puisse être ce que tu attends de moi. »

Titre : Cinquante nuances de Grey

Autrice : E.L. James

Genre : Dark Romance – romance

Éditeur : Le livre de poche

Prix : 8.20€

Nombre de pages : 672

Parution : 05 février 2014

Résumé :

« Lorsque qu’Anastasia Steele est missionnée par son amie journaliste pour la remplacer au pied levé et aller interviewer un jeune chef d’entreprise en pleine réussite, Christian Grey, elle n’y va que pour faire plaisir à son amie…
Elle se s’attendait vraiment pas à ce qui va arriver : une attirance physique réciproque qui va la troubler jusqu’au plus profond de son être.
Totalement inexpérimentée dans ce domaine, Anastasia va découvrir le plaisir, l’érotisme et le pouvoir que ça lui donne sur les hommes.
C’est dans ce contexte qu’elle va finir par accepter le contrat plutôt surprenant et inhabituel que lui propose Christian Grey… »

Mon avis :

CW : BDSM, pédophilie, sado-masochisme.

Cela fait un petit moment maintenant que je m’amuse à lire et à regarder des œuvres considérées comme « cultes », autant des anciennes que des plus récentes.

Pendant mon adolescence, j’ai vu passer le phénomène international littéraire et médiatique qu’était Cinquante nuances de Grey. Tout le monde en parlait, n’en disait que du bien et, surtout, disait que c’était LE livre à lire. Alors, forcément, de fil en aiguille, j’ai commencé à voir des personnes de mon entourage lire cette fameuse trilogie – des personnes que je n’avais jamais vu avec un livre dans les mains – et regarder les adaptations cinématographiques.

Selon moi, c’est indéniable : cette saga a créé un gros changement sur la vision des romances et, de manière plus générale, sur les livres ; tout en ouvrant la porte aux Dark Romances.

Lorsque le premier film est sorti, j’avais quatorze ans. J’avais conscience des thématiques qui n’étaient pas faites pour moi, mais j’étais extrêmement curieuse. Pourquoi tout le monde en parle ? Je voulais comprendre le phénomène ! C’est alors que je me suis promis de lire, un jour, cette trilogie. En grandissant, j’avais littéralement tout entendu sur ces livres, allant du bon au mauvais. Et vis-à-vis des critiques que j’avais pu lire, j’étais très réticente.

Aujourd’hui, je lis régulièrement de la romance et, de plus en plus, de Dark Romance. Ainsi, cher.e.s lecteur.ice.s, ce jour, tant attendu pour moi, est arrivé !

« Je suis venu de Seattle en hélico rien que pour toi, et voir ta tête en ce moment, ça vaut le voyage. »

Pour résumer, même si je pense que même celles et ceux qui n’ont jamais lu le premier tome savent de quoi il en retourne, nous suivons Anastasia Steele, une jeune étudiante en lettres qui se voit missionnée par sa meilleure amie Kate. Cette dernière, étant malade, supplie Ana de la remplacer en tant que journaliste pour effectuer une interview immanquable. En effet, il s’agit de celle d’un jeune chef d’entreprise multimillionnaire, nommé Christian Grey, qui n’en accorde jamais.

Anastasia n’est absolument pas préparée, ni pour l’interview ni pour l’homme en face d’elle. C’est lors de cet entretien particulier qu’une attirance physique réciproque et troublante va voir le jour. Anastasia est déboussolée et Christian, lui, la veut immédiatement à ses côtés, pour son propre plaisir, mais aussi parce qu’il n’arrive étrangement pas à se détacher d’elle et à l’oublier. Elle hante, littéralement, ses pensées.

Toutefois, ce qu’Anastasia ne sait pas encore, c’est que Christian possède un penchant pour le BDSM. Alors que notre chère Ana est complètement inexpérimentée, elle va finir par accepter un contrat avec lui, tout simplement, car il réveille en elle des pulsions sexuelles qu’elle ignorait jusqu’ici et elle compte bien se prendre au jeu…

« – Anastasia, je ne suis pas du genre à offrir des fleurs et des chocolats… Les histoires d’amour, ça n’est pas mon truc. J’ai des goûts très particuliers. Vous devriez m’éviter.
Il ferme les yeux, comme s’il s’avouait vaincu.
– Il y a quelque chose en vous qui m’attire irrésistiblement, ajoute-t-il. Mais je crois que vous l’aviez déjà deviné. »

Après avoir lu ce premier tome, j’ai énormément de choses à déballer. Alors, trouvez votre Christian Grey pour vous harnacher parce que ça va secouer !

Dès le début de ma lecture, j’avais l’impression de retrouver de grosses similitudes avec la saga Twilight. Et quelle ne fut pas ma stupéfaction (c’est faux), lorsque j’ai appris qu’il s’agissait à l’origine d’une Fan Fiction Twilight.

Êtes-vous prêt.e.s pour un jeu de ressemblances ? Allez, c’est parti mon kiki !

On retrouve, en premier lieu, l’archétype du personnage féminin, complètement naïf, maladroit, vierge, aux parents divorcés, dont tous les hommes semblent irrésistiblement attirés par elle. Une héroïne qui fait tomber tous les hommes autour d’elle, alors qu’elle ne se trouve pas jolie. Ensuite, sa vie simple et banale – voire, un peu trop… sérieusement, est-ce qu’Ana vivait dans une grotte pour être aussi dépourvue de toute technologie ? – se voit toute chamboulée lorsqu’elle rencontre Christian. Un homme énigmatique, ténébreux et chevalier servant à ses heures perdues ; qui pour couronner le tout est un richissime homme d’affaires, d’une beauté égale à celle d’un dieu grec. Étonnant, n’est-ce pas ? Selon les stéréotypes présents dans les romances, c’est la définition même d’un homme dangereusement attirant.

Ensuite, Christian Grey commence à la stalker, puis à la traquer littéralement tel un Edward Cullen 2.0. Ah oui, j’oubliais ! Christian est aussi un maniaque du contrôle, au caractère autoritaire… BREF. Si je devais résumer de manière un peu grossière notre cher Christian, je dirais qu’il s’agit d’un « sacré fouineur », « harceleur de première » et assez culotté d’être « jaloux » des autres hommes qui gravitent autour d’Anastasia, pour un homme qui, je le rappelle, vient tout juste de la rencontrer.

Comme notre cher Edward, il cache un sombre secret que personne ne saitmais à défaut d’être un vampire d’une centaine d’années, Grey s’adonne à d’autres plaisirs coupables que ceux de sucer le sang de ses victimes !

Il est l’heure de coucher les enfants parce que la réécriture a pris un tournant assez inattendu. Pour Grey, le sexe, c’est tout un art et je dirais même que c’est plus qu’un art. Et ce n’est pas rien de le dire puisqu’il se consacre à des pratiques sadomasochistes, en prenant plaisir à dominer ses partenaires de jeu. Et dans un sens, on peut dire qu’il s’agit d’une thérapie, comme une autre, pour satisfaire des besoins qui n’ont pas été comblés pendant son enfance.

« – Je te présente comment ? « Papa, voici l’homme qui m’a déflorée et qui veut entamer une relation sado-maso avec moi ? » J’espère que tu cours vite.
Christian me fusille du regard, mais les commissures de ses lèvres tressaillent. Et, bien que je sois furieuse contre lui, je ne peux pas m’empêcher de répondre à son sourire.

– Sache que je cours très vite, en effet. Tu n’as qu’à lui dire que je suis un ami, Anastasia.« 

Oui, je peux comprendre que cela puisse paraître étrange, mais ici, on est très ouvert d’esprit. Cependant, même si je suis tolérante, beaucoup de choses m’ont dérangée lors de ma lecture…

Premièrement, je peux tout à fait concevoir la soumission, la domination et tout ce qui va avec, notamment, dans le cadre d’une Dark Romance. Néanmoins, dans ce roman, je trouve qu’il y a énormément de « pédophilie décomplexée », surtout, vis-à-vis de la sexualisation de la figure de l’enfant… Je m’explique :

Christian Grey tombe dans le BDSM et dans la soumission à l’âge de 15 ans, lors d’une relation avec la meilleure amie de sa mère, où il deviendra soumis. Vous voyez où je veux en venir ? Il apprécie cela et, en grandissant, il reproduit ce même schéma en prenant cette fois-ci la position du dominant. Un schéma que l’on retrouve, par conséquent, dans sa relation avec Anastasia. Toutefois, je trouve que le « complexe de l’enfant » qu’Ana et celui « du père » que Christian transmettent sont « malsains ». Par exemple, lorsqu’Ana fait deux couettes à ses cheveux, nous avons tout de suite la comparaison : « comme une petite fille ». Christian lui met des fessées à chaque fois qu’elle fait ce qu’il lui était interdit. Il lui passe un peignoir « comme si j’étais une petite fille », etc. Certains appelleront ça un « simple fantasme »… Excusez-moi par avance pour la violence du terme, mais moi, j’appelle ça de la « pédophilie refoulée ».

Qui plus est, on est quand même sur le b.a.-ba d’une relation malsaine, toxique et surtout, autodestructrice. Ana est obligée de le supplier pour ne pas qu’il la batte à base de fessées. Monsieur, qui a toujours une érection, l’empêche de jouir pour la frustrer et lorsqu’il est en colère contre elle, tous leurs problèmes se règlent grâce à la communication charnelle. En ce qui concerne le fameux contrat, vis-à-vis de la nourriture, de l’exercice physique et de l’hygiène/beauté, je trouve que cela donne une vision très stéréotypée et sexiste du corps de la femme et du regard de l’homme sur la femme. Alors, oui, je sais… le BDSM en lui-même peut-être considéré comme sexiste, mais tout de même !

En outre, lors de ma lecture, j’avais exactement le même âge qu’Anastasia dans le premier tome, soit 21 ans. Et, pourtant, je trouvais ses réactions un peu, voire, énormément niaises pour son âge ou en tout cas, à mes yeux, ce sont des réactions puériles ! Certes, je sais très pertinemment que chaque personne est différente et qu’il en est de même pour leurs réactions, mais je n’ai pas pu m’empêcher de trouver ça « éloigné » de la réalité. En parallèle, j’ai été déçue… J’adore lorsque les personnages principaux aiment la littérature, car souvent les auteur.ice.s évoquent un certain nombre d’ouvrages, à partir de citations ou bien, grâce au titre d’une œuvre et/ou au nom de l’auteur.ice. Chose que j’apprécie grandement, car cela me permet de redécouvrir certaines œuvres, voire, d’en découvrir de nouvelles que je m’empresse de déposer dans ma pile à lire, par pure curiosité ! Je pensais avoir tiré le grelot avec Ana, mais pour une étudiante en lettres et grande fan de littérature, elle ne citait en permanence que Tess d’Uberville… C’est tellement dommage, selon moi, de n’avoir pas poussé ce côté-ci !

« Anastasia. Elle a visiblement une grande influence sur vous. Son départ a déclenché chez vous votre syndrome de l’abandon et votre trouble de stress post-traumatique. À l’évidence, elle a pour vous beaucoup plus d’importance que vous ne le dites. Beaucoup plus. »

Même si je dois avouer que l’histoire est assez prenante, simple et sans prise de tête, je n’ai pas tellement accroché à l’écriture. Elle était plate et rendait la lecture un peu longue et ennuyeuse. Qui plus est, je ne sais pas si c’est la traduction ou la plume de l’autrice qui est comme telle, mais il y avait de nombreuses répétitions et les répliques ne volaient pas très haut. Et puis, en toute sincérité, les phrases du type : « J’ai l’impression d’être une vilaine petite fille. Ça m’excite. », « Je ne fais pas l’amour… je baise brutalement », « accroche-toi, on y va bébé, un petit coup en vitesse », me faisaient constamment lever les yeux au ciel. Je ne peux pas le nier : j’ai ri. Oui, j’ai ri… Et qu’est-ce que j’ai ri lors de ma lecture, surtout grâce à certaines répliques que l’on voit partout, comme la fameuse : « vous devriez m’éviter ». Des phrases bien clichées, bien romances à l’ancienne !

Vous allez dire que je me plains tout le temps, mais j’ai eu du mal avec le vocabulaire cru, voire, vulgaire. Pendant ma lecture, je me suis même demandée où était l’intrigue. À part « Anastasia Steele au pays merveilleux du BDSM : l’initiation inédite d’une vierge dans des pratiques sexuelles et contractuelles sadomasochistes ! », il n’y a AUCUNE intrigue. Il me manquait clairement quelque chose ; à tel point, qu’à un peu plus de la moitié du roman, j’ai cru que j’allais finir par abandonner ma lecture. J’ai même dû faire une pause avant de reprendre.

Mais, alors, pourquoi me forcer à continuer ?

Tout simplement, parce que je voulais absolument comprendre pourquoi ce livre est devenu, plus ou moins, culte et comment a-t-il pu devenir un phénomène international ! Heureusement pour moi, les dernières pages m’ont fait légèrement changer d’avis, notamment, parce qu’Ana prend conscience de la toxicité de cette relation. Et, si vous voulez mon avis, il était grand temps !

Je pense que je peux vous avouer que j’ai vu ce premier tome, comme une punition, mais aussi comme une grosse poilade. En effet, avec tous les red flags ambulants que cette relation nous offre, j’ai essayé de dédramatiser en riant de ma lecture. Et je me suis rendue compte qu’en plus de la gronder comme son daron, Christian Grey a tout d’un serial killer ! Je suis désolée de casser le délire, mais un homme qui vient demander des colsons, du gros scotch et plusieurs mètres de cordes, pour moi, c’est le nouveau Xavier Dupont De Ligonnès !

« Elle t’avait sauvé de toute cette merde, Grey.
Tu n’avais plus à revivre l’horreur de ces souvenirs quand elle était là. Pourquoi l’as-tu laissée partir ? »

Pour terminer, je pense que, lors de sa publication, c’était un « bon » livre. C’était un roman dans les tendances, plutôt « révolutionnaire » du genre de la romance et permettant de mettre en avant le genre de la Dark Romance. Aujourd’hui, je pense que ça a très mal vieilli, notamment, parce qu’il y a énormément de Dark Romance bien meilleures, mieux documentées et mieux amenées !

Dans une certaine mesure, je suis contente d’avoir attendu avant de lire cette romance, car je pense très sincèrement que si j’avais lu cette histoire plus tôt, j’aurais pu facilement idéaliser cette relation – comme j’ai pu le faire lors de ma première lecture d’After d’Anna Todd. À ce jour, je ne trouve pas l’histoire du premier tome de Cinquante nuances de Grey transcendante et, pour cause, j’en ris. C’est pourquoi, je pense qu’il faut une certaine maturité pour prendre du recul sur certaines œuvres qui proposent des genres, des thématiques et des relations pareils.

J’ai beaucoup critiqué ma lecture pendant cette chronique, mais je ne crache pas dans la soupe : j’ai été agréablement surprise par le dénouement de ce premier tome de Cinquante nuances de Grey, à tel point que j’ai eu envie, contre toute attente, de lire la suite – eh oui, comme quoi, tout peut arriver !

Quelques citations supplémentaires :

« J’étudie ce dossier pour la centième fois depuis que je l’ai reçu il y a deux jours pour trouver des indices sur l’énigmatique Mlle Anastasia Rose Steele. Je n’arrive pas à oublier ce fichu petit bout de femme et ça commence à m’énerver sérieusement. Cette dernière semaine, au cours de réunions particulièrement ennuyeuses, je me suis surpris à me repasser l’interview dans ma tête. Ses doigts maladroits sur le dictaphone, sa façon de se caler les cheveux derrière les oreilles, de se mordre la lèvre, ça me remue chaque fois.
Et maintenant, me voilà garé devant Clayton’s, la modeste quincaillerie où elle travaille.
Tu es cinglé, Grey. Qu’est-ce que tu fous là ? »

« Elle ne veut pas que je m’en aille. Et elle ne veut pas partir non plus. La candeur de cette déclaration me traverse comme une brise d’été, laissant dans son sillage une douce chaleur et de l’espoir.
Non, elle ne va pas me quitter. Tu l’as ta réponse, Grey ! »

L’autrice :

@babelio

Erika Leonard, née Erika Mitchell et plus connue sous son pseudonyme E.L. James, travaille à la direction d’une chaîne de télévision. Mariée, au scénariste et réalisateur Niall Leonard, elle a deux enfants et vit à Brentford, à l’ouest de Londres.

Elle se passionne à écrire des fanfictions ; d’ailleurs, sa trilogie Fifty Shades of Grey se base sur l’univers de Twilight. Le succès est immense pour ces livres que des adaptations cinématographiques sont apparues. La presse qualifiera de « Mummy Porn », livres pornographiques pour ménagères de moins de cinquante ans, cette trilogie.

En 2012, le magazine « Time » la place dans les 100 personnes les plus influentes du monde. Après 2015, elle réécrit la trilogie, avec une variante. Il s’agit des trois tomes vus par Christian Grey.

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Se procurer le roman : Place des librairies, Furet du nordFnacDecitreCultura

Je suppose que vous avez vu passer cette saga qui a littéralement

chamboulé le monde littéraire et médiatique, mais dites-moi,

qu’en avez-vous pensez ?

Valériane, alias filledepapiers🤍


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